23 novembre 2021
Examen du Projet de Loi de Finances 2022 : quels changements ?
Le 16 novembre dernier, les députés ont adopté, en première lecture, le PLF 2022.
Rappel sur le calendrier d’adoption d’un PLF
Comme chaque année, le PLF fera l’objet d’une navette entre l’Assemblée nationale et le Sénat, les députés ayant le dernier mot en cas de désaccord, en vue de l’adoption du PLF vers la mi-décembre.
Donnant souvent lieu à une saisine du Conseil constitutionnel, amené à se prononcer en quelques jours, la Loi de finances pour 2022 devrait paraître comme chaque année au Journal officiel du 30 ou 31 décembre.
Les informations indiquées dans la présente note sont donc susceptibles de plusieurs modifications dans le temps.
Exonération de TFPB (taxe foncière sur les propriétés bâties)
Le PLF traduit au niveau législatif plusieurs propositions formulées dans le rapport (vol. I) de la Commission Rebsamen (mesures fiscales).
Substitution d’un crédit d’impôt à l’exonération de TFPB du LLI
Issu de l’amendement 3534 du gouvernement, l’article 29 Q nouveau du PLF instaure une « créance » d’impôt sur les sociétés aux personnes morales éligibles au taux réduit de TVA (10%) qui acquièrent des logements locatifs intermédiaires et qui devront payer la TFPB due à ce titre.
La durée de ce CI est de 20 ans (durée de l’exonération préalablement applicable). Toutefois, elle est réduite à due concurrence du nombre d’années d’exonération totale de la TFPB dont peuvent bénéficier les logements (comme celle applicable aux constructions neuves).
Le cas échéant, ouvrent également droit au CI, certaines taxes additionnelles listées au nouvel article 220 Z du CGI ainsi créé (taxe GEMAPI, taxe additionnelle spéciale annuelle au profit de la région d’Île-de-France, etc.).
En « contrepartie », le paiement de la TFPB ne pourra pas être déduit (non admise dans les charges déductibles) pour la détermination du bénéfice imposable des personnes morales concernées.
Ce nouveau CI s’applique aux logements dont la construction est achevée à compter du 1er janvier 2023.
L’assouplissement de la condition de mixité sociale pour le bénéfice du taux réduit de TVA en LLI
Parallèlement à l’instauration de ce CI, l’article 29 Q modifie l’article 279-0 bis A du CGI relatif au taux réduit de TVA (10%) dont bénéficient les acquéreurs de LLI. Ces derniers sont dispensés de réaliser une quote-part de logements locatifs sociaux lorsque l’ensemble immobilier est implanté dans une commune disposant de + 35% de LLS. Le PLF 2022 réduit ce taux à 25%.
Ces dispositions sont applicables aux livraisons de logements pour lesquels la demande de PC sera déposée à compter du 1er janvier 2023. Toutefois, pour les VEFA, il s’applique aux livraisons de logements ayant fait l’objet d’un acte de vente, ou d’un contrat de réservation, signé à compter de cette date.
Compensation de l’exonération du TFPB dont bénéficie le logement social
Annoncé le 28 septembre par le Premier ministre lors du Congrès de l’Union sociale pour l’habitat (USH), l’amendement 1665 du gouvernement a été adopté.
L’article 42 quater prévoit la compensation « intégrale », par l’État, aux collectivités, pendant dix ans, de la perte de recettes liée à l’exonération de TFPB dont bénéficie la production de logements locatifs sociaux, pour tous les logements locatifs sociaux agréés entre le 1er janvier 2021 et le 30 juin 2026.
Afin de mesurer l’efficacité de cette mesure sur la production de logements locatifs sociaux sur la période 2021-2023, un rapport d’étape sera remis par le gouvernement au parlement en 2024.
Ajustement de la taxe d’aménagement
L’article 31 undecies du PLF retouche les textes relatifs à la TA afin de remédier à un oubli du législateur. Issus de plusieurs amendements d’initiative parlementaire, cet article prévoit que lorsque la perception de la TA demeure communale, et qu’une part du financement des équipements générateurs de la taxe relève de la communauté, le reversement doit de plein droit (doit au lieu de peut).
L’article 31 duodecies assouplit les conditions d’exonération de la TA en cas de reconstructions après sinistre, d’une surface égale, dans l’hypothèse où la reconstruction à l’identique est rendue impossible du fait des règles d’urbanisme en vigueur. Le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt. a approuvé l’adoption de ces dispositions au nom de la lutte contre l’artificialisation : « La conséquence est un assujettissement à la taxe d’aménagement, qui ajoute une charge pour des ménages déjà sinistrés, voire les incite à reconstruire ailleurs […], au risque de participer à l’artificialisation des sols ».
D’autres dispositions ont été adoptées visant à permettre d’exonérer les serres de jardin édifiées par les particuliers, de moins de 20 m² (art. 31 terdecies) et à adapter l’organisation des services de l’État chargés de l’urbanisme dans la perspective du transfert au 1er septembre 2022 de la gestion des taxes d’urbanisme à la direction générale des finances publiques. Ces dispositions permettre la mise en place transitoire d’une gestion interdépartementale de la liquidation de cette taxe, en supprimant toute référence à l’échelon départemental.
Réduction d’impôts
Le dispositif Pinel
L’article 29 Z ter du PLF proroge jusqu’au 31 décembre 2024 (actes de vente) l’expérimentation bretonne du dispositif Pinel, afin de « donner de la visibilité aux contribuables investissant au sein de cette région (la Bretagne) et de ne pas modifier pour les années restantes les paramètres locaux d’application de ce dispositif ».
L’article prévoit également la remise d’un rapport d’évaluation du « Pinel breton » au Parlement, au plus tard le 30 septembre 2024.
Nota : L’expérimentation porte sur les territoires, les plafonds de ressource et loyers applicables. Les autres critères du dispositif Pinel (recentrage sur le logement collectif, modulation du taux de la réduction « Pinel + ») restent applicables. Il en va également ainsi de l’application du dispositif Pinel dans les communes couvertes par un Contrat de Redynamisation de Sites de Défense.
Les critères environnementaux de « Pinel+ » sont-ils connus ?
Oui et non. Oui parce que la ministre du logement, Emmanuelle Wargon, a apporté des précisions le 15 novembre lors d’une conférence de presse sur ce point, et non car ces annonces devront être traduites dans un décret, dont la publication devrait intervenir avant la fin de l’année.
Aux termes des annonces de la ministre, le « Pinel + » serait applicable dans les conditions suivantes :
Pour 2023 (acte de vente en VEFA) :
- logements situés en QPV (uniquement – pas les périmètres alentours)
- OU logements satisfaisant cumulativement à :
- des critères d’usage : présence systématique d’espaces extérieurs + surface minimale des logements (28 m² de surface totale pour un T1, 45 m² pour un T2, 62 m² pour un T3, 79 m² pour un T4 et 96 m² pour un T5) + double orientation à compter du T3
- ET des critères de performance environnementale : RE 2020 seuils 2025 + min. DPE B
Pour 2024 :
- logements situés en QPV (uniquement – pas les périmètres alentours)
- OU logements satisfaisant cumulativement à :
- des critères d’usage : identiques à 2023
- ET des critères de performance environnementale : RE 2020 seuils 2025 + min. DPE A
Le dispositif Censi-Bouvard
L’article 29 K du PLF proroge d’un an le dispositif d’investissement locatif Censi-Bouvard, jusqu’au 31 décembre 2022 (acte de vente), « le temps que soit établi un rapport d’évaluation sur son efficience économique, sociale et environnementale, s’agissant notamment des caractéristiques et performances énergétiques des logements qui en sont l’objet ».
« Pour permettre d’apprécier l’opportunité de sa prorogation au-delà de cette date, [le texte adopté] propose que le Gouvernement remette ce rapport au Parlement avant le 30 septembre 2022 ».
Le dispositif Cosse-Louer abordable
La ministre en charge du Logement, Emmanuelle Wargon, l’avait annoncé le 6 octobre dernier, l’amendement 3536 porté par le gouvernement, adopté par les députés (article 29 C), transforme, à compter du 1er janvier 2022, le dispositif de déduction forfaitaire au titre des revenus fonciers « Louer abordable » en une réduction d’impôt pour les propriétaires de logements privés, et le proroge sous cette nouvelle forme jusqu’au 31 décembre 2024.
Par cette mesure, la ministre veut rendre ce dispositif plus attractif, en particulier dans les zones tendues.
Cette nouvelle réduction d’impôt, inscrite à l’article 199 tricies du CGI, s’applique aux logements, quels qu’ils soient, où qu’ils soient, faisant l’objet d’une convention ANAH, conclue entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2024. La loi étant muette sur ce point, on en déduit que la date d’acquisition du bien loué est sans incidence.
Les logements éligibles sont ceux justifiant du respect d’un niveau de performance énergétique globale fixé par un arrêté à paraitre.
Le bien doit être loué nu à usage d’habitation principale.
Il ne peut être loué à un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant du contribuable ou avec une personne occupant déjà le logement, sauf à l’occasion du renouvellement du bail.
La durée de la location est calée sur celle de la convention ANAH, réduite à 6 ans, voire prorogée jusqu’à l’expiration du bail en cours, sous réserve du respect des conditions de location.
Le bénéfice de la RI est conditionnée au respect de plafonds de ressources et de loyer, qui seront définies par décret.
Le taux de la RI varie selon la nature intermédiaire (15%) ou sociale (35%) du niveau de loyer pratiqué et des modalités de location. Ce taux est porté à 40% « des revenus bruts de ces logements » pour des loyers intermédiaires, ou à 65% pour des loyers sociaux, en cas de recours à des organismes exerçant des activités d’intermédiation locative et de gestion locative sociale.
La RI est cumulable avec l’abattement forfaitaire de 30% sur les revenus locatifs bruts. En revanche, elle ne peut être cumulée avec notamment le dispositif Malraux ou Pinel.
Le dispositif Denormandie
L’article 29 L du PLF proroge d’un an, jusqu’au 31 décembre 2023, la RI Denormandie, et prévoit la remise d’un rapport d’évaluation du dispositif par le Gouvernement auprès du Parlement, avant le 30 septembre 2022.
Plus-values immobilières
L’article 29 Z du PLF proroge d’un an, jusqu’au 31 décembre 2023, l’application du taux réduit d’IS en cas de cession d’un immeuble en vue de la réalisation de logements (art. 210 F du CGI).
PTZ
L’article 29 W du PLF proroge d’un an, jusqu’au 31 décembre 2023, le PTZ.
Il reporte d’autant l’entrée en vigueur des modalités d’appréciation des revenus des ménages, initialement prévue par la LFI 2021 au titre des offres de prêts émises à compter du 1er janvier 2022. Pour mémoire, il s’agissait de prendre en compte les revenus de l’année de l’émission de l’offre de prêt, plutôt que ceux de l’avant-dernière année précédant l’émission.
Autres mesures à signaler
Réduction de Loyer de Solidarité : l’article 29 Z quinquies du PLF a pour objet de mettre en œuvre, de manière identique au PLF 2021, la suspension, pour 2022, de l’indexation au 1er janvier du montant des plafonds de ressources mensuelles ouvrant droit à la réduction de loyer de solidarité sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation des ménages hors tabac constatée pour l’avant-dernière année précédant cette revalorisation.
Éco-PTZ : L’Eco-PTZ est prorogé de deux ans, au 31 décembre 2023. Le plafond de l’éco-PTZ « performance énergétique globale » est augmenté (50 000 €), ainsi que la durée de remboursement (20 ans). Est également prorogée de deux ans, jusqu’au 31 décembre 2023, l’expérimentation, conduite en Île-de-France et dans les Hauts-de-France, de distribution de l’éco-PTZ par des sociétés de tiers-financement.
Valeurs locatives : l’article 31 sexdecies du PLF vise à mettre en place une obligation déclarative pour collecter les données relatives aux maisons d’habitation présentant des caractéristiques « exceptionnelles » (tels que les châteaux et les maisons classés ou inscrits à l’inventaire des monuments historiques), dans le cadre de la proposition de la mise en œuvre de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation prévue en 2026. Cette collecte est nécessaire à la remise du rapport sur la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, qui doit être soumis au parlement avant le 1er septembre 2024.