9 octobre 2023
1er semestre 2023 : un marché de l’individuel aménagé normand qui poursuit sa chute vertigineuse
Lots Aménagés |
Alors que la crise immobilière est désormais dans tous les esprits, le marché de l’individuel aménagé normand en prend malheureusement sa part. Crise immobilière, financière ou structurelle ? La question se pose légitimement tant les désistements en cascade déjà observés en 2022 s’accélèrent.
Si l’offre commerciale augmente de 26 % en un an (soit 2062 terrains à bâtir disponibles en Normandie), les ventes reculent de 46 % (soit 581 ventes). La faute est à une conjonction de facteurs désormais bien connus de hausse des taux d’intérêt, de coût de construction, mais aussi (et presque surtout) des critères d’octroi de crédits. L’ensemble désolvabilise de fait une grande partie des ménages, les premiers impactés étant les primo-accédants. Ils sont quasi-intégralement évincés de l’accession à la propriété et condamnés à rester locataires (donc précaires).
Notons que le marché normand observe quelques disparités que nous décryptons pour vous :
Marché de la Seine-Maritime
Le marché seinomarin enregistre 115 ventes nettes, soit – 67 % par rapport au 1S22 (plus bas historique depuis très longtemps). L’activité se concentre exclusivement sur Caux Vallée de Seine et la région de Rouen (exception faite de la Métropole Rouen Normandie qui n’enregistre que 3 réservations nettes !). La demande est absente et ce, peu importe le prix et l’emplacement. Malgré des mises en vente en baisse de 36 % (226 lots) l’offre commerciale continue à augmenter : 745 lots disponibles soit + 16 %. Il faut aujourd’hui 39 mois pour écouler le stock.
Côté prix, il faut compter en moyenne 84 753 € (+ 9 %) pour un terrain de 627 m² (- 6 %).
Marché du Calvados
Contrairement à la Seine-Maritime, le Calvados subit de façon moins importante l’arrêt de l’activité. Avec 327 ventes nettes (-19 %) les ventes tiennent essentiellement par le secteur de Caen Métropole, voire de la CU Caen la mer. La demande subsiste et plus les prix des terrains sont élevés, plus la demande de secundo accédants se révèle active. Les mises en vente sont au rendez-vous avec 554 nouveaux terrains (+47%) et une offre commerciale de 686 lots (+45%).
Toutefois, soulignons que de nombreuses opérations (1/3 des mises en ventes au S1 2023) sont en réalité le fruit de permis d’aménager ou ZAC, antérieurs à 2022 et dont les tranches nouvelles profitent des antériorités desdites opérations. Nombre de nouvelles opérations séduisent, certes, mais à des prix qui ne font qu’augmenter, du fait de l’inflation des coûts de travaux mais aussi du foncier ; matière en raréfaction donc en inflation forte…
Côté prix, il faut compter en moyenne 91 493 € (+ 17 %) pour un terrain de 465 m² (+ 0.5 %). Il faut aujourd’hui 13 mois pour écouler le stock.
Principaux marchés de l’Eure
Avec 75 ventes nettes ce semestre, les principaux marchés de l’Eure accusent un coup d’arrêt brutal de l’activité (-57%). Les mises en vente reculent de 52 % (100 lots) mais l’offre commerciale augmente mécaniquement de 12 % (406 lots disponibles).
Tous les marchés sont concernés (Seine-Eure Agglomération, Evreux Portes de Normandie, Seine Normandie Agglomération ou encore Pays de Conches).
Et pourtant, des prix plus abordables pour ce marché puisqu’il faut compter en moyenne 62 726 € (-5%) pour un terrain de 616 m² (-18%). Il faut aujourd’hui 30 mois pour écouler le stock.
Principaux marchés de la Manche
Avec 64 ventes enregistrées ce semestre, ce secteur souffre lui aussi d’un manque de réservations (-56 % en un an). Pour autant, la CA du Cotentin et St Lô Agglo renouvellent leur offre avec 116 mises en vente. S’ajoutent à cette offre 6 lots proposés sur la CC de Granville. L’offre commerciale représente 225 lots disponibles, soit + 37 %.
Côté prix, il faut compter en moyenne 66 862 € (+ 8 %) pour un terrain de 444 m² (- 20 %). Il faut aujourd’hui 21 mois pour écouler le stock.
Au-delà d’un marché quasi à l’arrêt, un élément attire notre attention : une stratégie de planification foncière, de développement de l’habitat et d’emplois portée par les collectivités constitue une vertu évidente. Cette maîtrise permet de diversifier l’offre et de travailler sur des formes urbaines complémentaires avec en particulier des macro lots pour de la promotion immobilière et du logement social.
Par ailleurs, les modèles économiques et financiers d’aménagement sont les plus probants pour maîtriser les charges foncières des promoteurs et bailleurs qui inscrivent leurs réalisations dans les nouveaux quartiers.
Ils permettent ainsi de travailler une offre de prix plus maîtrisés, voire variés, et de proposer des projets d’ensemble alliant développement économique, mobilité, services et in fine attractivité pour le secteur du logement.
La diversité de situations entre la Seine-Maritime et le Calvados illustre les effets des mesures d’accompagnement du développement des territoires : plus elles sont actives, plus les effets vertueux recherchés sont approchés ou atteints (limitation des consommations foncières, rapprochement domicile-emploi, meilleure fluidité du parcours résidentiel et des rotations dans le parc de logements, optimisation des moyens de transports publics ou
partagés, etc…)
La situation actuelle dépasse la seule activité de production de lots aménagés, elle grippe le parcours résidentiel d’une grande partie de la population. En stoppant le financement de projets, ce sont de potentiels acquéreurs qui se maintiennent dans leur logement – souvent par défaut. Ainsi, les transactions dans le parc ancien que ce soit à l’achat ou à la location souffrent de ce blocage.
Il est urgent que le marché reprenne sa fluidité afin de permettre à nos concitoyens d’évoluer y compris professionnellement (rappelons que la mobilité professionnelle, l’installation de nouvelles entreprises, écoles supérieures…est aussi possible grâce à une offre de logements à la hauteur des besoins).
L’alliance pour le logement qui a été engagée par l’ensemble des organisations professionnelles est un signal fort et inédit que nous devons toutes et tous faire entendre pour agir face à cette urgence.
Le logement, un bien de première nécessité !