Marché de la Promotion Immobilière en Normandie au 3ème trimestre 2024 : Une chronique annoncée.

Nous souhaiterions tout de même démarrer sur une note d’optimisme en ce 3ème trimestre 2024 : La chute d’activité confirme son ralentissement, après avoir atteint des niveaux historiquement bas, équivalents aux années 2008-2009.

Cette situation inédite, est la conjonction d’une multitude de causes, exacerbée par des prix qui structurellement ne peuvent s’ajuster pleinement à la solvabilité des ménages et dégradée par la remontée des taux d’intérêt (malgré une inflexion à la baisse depuis un an). Les promoteurs se trouvent encore et toujours dans une impasse ; entre un cumul de chute des ventes et un maintien des coûts de production, qui continue de creuser l’écart entre la production et le besoin croissant de logements (en particulier en logements abordables).

Avec un volume de 446 réservations en Normandie, les ventes du 3ème trimestre sont en baisse par rapport au trimestre précédent (-19%) mais semblent réamorcer une légère courbe ascendante en comparaison avec le 3ème trimestre 2023. (+10%). Les opérateurs, malgré tout, tentent de garder le cap en termes d’offre commerciale qui s’élève à 3460 lots, affichant un léger recul de 13% sur ce trimestre (comparé au T2-2024) avec principalement trois secteurs impactés : la Région de Rouen, Le Havre et la Côte Fleurie.

A noter, les retraits de vente restent toujours très élevés : 588 lots ce trimestre. Les ventes en bloc représentent 336 lots. Le marché normand est toujours porté par les demandes de logements de type T2 et T3 qui représentent plus de 70% des réservations. Nous observons une stabilisation sur les ventes de T4 et T5 (typologies qui restent très « confidentielles » dans les volumes généraux de vente).

Le marché de Caen la mer semble reprendre des couleurs en repassant la barre des 200 réservations ce trimestre (non franchie depuis plus d’un an).  Pour autant, la fragilité du marché reste persistante et amène toujours à la prudence. La proportion des désistements (22) semble se réduire et recule de 61% ce trimestre par rapport au 3ème trimestre 2023 (56). Notons que les ventes à investisseurs remontent à 52% des réservations (dernières opportunités du dispositif PINEL ?). Dans ce contexte, les prix à l’offre sont stables sur la communauté urbaine (4 250 €/m² en moyenne parking inclus) et semblent en cohérence avec la demande (4 098€/m²).  Les prix de vente sous l’effet des offres des opérateurs sont de 3% inférieurs pour limiter ou écouler les stocks durs. Pour Caen, la proportion de vente en secteur aménagé est de 33% (69 ventes sur 209) avec une tendance plutôt stable (37% en T3-2023 soit 58 ventes sur 156).

Le marché de la Métropole Rouen Normandie subit un fort repli d’activité, ses mises en vente (81) sont presque divisées par 3 ce trimestre (par rapport au 3ème trimestre 2023) et ses ventes reculent de 20% par rapport au 3ème trimestre 2023. L’offre commerciale s’amenuise également (-18% en un an). Ce repli est relativement moins marqué sur la périphérie de Rouen ; fait notable : les ventes réalisées sur la région de Rouen sont supérieures à celles de la Ville de Rouen, alors que pour les mises en vente, c’est le contraire. Nous notons beaucoup de retraits ce trimestre (204) et enregistrons 195 ventes en bloc. Nous observons un delta de 9% entre les prix de l’offre (4 232 €/m² parking inclus) et les prix de vente (3 932 €/m²), ce qui montre que ce marché est beaucoup plus « négocié » que les autres ce trimestre. Pour Rouen, la proportion de ventes en secteur aménagé est nulle sur ce trimestre.

Le marché de Le Havre Seine Métropole subit également un fort ralentissement d’activité, -41% de mises en vente et -31% d’offre commerciale sur une année. Malgré tout, les réservations repartent à la hausse (+43% de réservations en un an). Il n’y a eu quasiment aucune vente en bloc sur ce marché depuis un an. Comme à Rouen, les ventes en secteur aménagé sont en net recul, et sur de faibles proportions soit 14 ventes représentant 21% ce trimestre contre 19 ventes représentant 40% en T3-2023. Les prix à l’offre se stabilisent (4 674€ / m² parking inclus) mais l’écart se creuse davantage avec les prix de ventes (4 184€/m²) soit près de 12% ; écart de prix qui s’explique par la fin de commercialisation d’un programme premium sur la Ville du Havre et par le retrait d’une autre opération à Sainte Adresse.

Le marché de la Côte Fleurie – Côte de Grâce accuse un effondrement des mises en vente ce trimestre, seulement 24 (soit une baisse de 86% sur un an). Il enregistre 67 ventes ce trimestre (soit -39% sur un an). L’offre commerciale recule également de 36% (430 lots disponibles à la fin de ce trimestre). La majorité des ventes se concentre sur des T2. Les prix de ventes moyens, plus élevés historiquement que les autres marchés de la région, tendent à se résorber pour avoisiner les 5 000€/m² parking inclus. Les prix à l’offre restent quant à eux relativement élevés (5 611€/m²).

Le marché est toujours principalement porté par les ventes à propriétaires occupants avec 69% des réservations ce trimestre, mais il faut noter que la part d’investisseurs remonte par rapport aux trimestres précédents (habituellement située autour de 25% contre 31% ce trimestre).

Les principaux marchés de l’Eure affichent des mises en vente divisées par trois depuis le 2ème trimestre et une offre commerciale très faible (185 lots sur les 3 460 à l’offre totale en Normandie) qui peine à rencontrer la demande. Les logements proposés semblent ne pas correspondre aux attentes des travailleurs en recherche de logement. Les prix de vente moyens sont de 3 830€/m², équivalents au prix de l’offre. A noter, un retrait de 114 lots correspondant à deux opérations sur Evreux et Louviers. Enfin, une note d’optimisme : avec 25 réservations de plus qu’au 3ème trimestre 2023, le marché vernonais donne du baume au cœur !

Les principaux marchés de la Manche nous montrent que les secteurs littoraux sont toujours attractifs avec une évolution des réservations pour des volumes à hauteur de 52 réservations (+41% en une année). L’observation des ventes et la hausse de l’offre commerciale (+58% sur un an) confirment que la demande est là, et ce, à ces niveaux de prix pratiqués. Les aires pourvues en emplois : Cherbourg, Granville, qui subissent une pénurie d’offre (respectivement 38 et 23 sur les 240 à l’offre), confirment également leur attractivité. Ceci est également démontré par des prix de vente qui poursuivent leur ascension : 4 454€/m² parking inclus, avec même un dépassement du prix de l’offre moyen qui est de 4 229€/m² ce trimestre.

Les volumes réalisés sur le marché de la Côte d’Albâtre sont trop faibles pour être analysés.

L’ensemble des données montrent que les Normands sont toujours en demande de maisons individuelles, mais sans dispositif d’aide à l’acquisition, c’est quasiment inaccessible. Le souci est qu’ils n’accèdent pas non plus au collectif, notamment à surfaces équivalentes ! Les grands logements censés accueillir des familles sont achetés par des occupants en fin de parcours résidentiel (retraite notamment). D’ailleurs l’ensemble des données confirme l’accentuation de la gentrification à l’œuvre depuis plusieurs mois creusant l’écart entre propriétaires et locataires. Les premiers pouvant continuer à être propriétaires et les seconds de plus en plus contraints de rester locataires.

Les dynamiques des territoires observés montrent bien la nécessité de réinstaurer l’effet vertueux de la proximité emploi-logement et donc la nécessité que l’aménagement des territoires prenne simultanément en compte ces deux données.  

Le renouvellement de l’offre reste pour autant toujours très insuffisant, conséquence de la difficulté croissante à obtenir des autorisations de construire mais aussi lié à l’abandon de projets ne trouvant plus leur équilibre économique. C’est tout un système qui est profondément grippé et qui peinera à reconstituer une offre commerciale à la hauteur des besoins en logements estimés d’ici la prochaine décennie.

Terminons sur une note d’optimisme : nous retrouvons ce trimestre, des indicateurs positifs après de très longs mois de cycle baissier. Ceci nous porte à croire que la situation va cesser de se dégrader. Nous laisserait-elle même entrapercevoir quelques éclaircies ? Nous ne sommes pas non plus a l’abri d’une bonne nouvelle en lien avec le dispositif PINEL !

Aymeric POUPEL – Président d’OLONN